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Les Filles de Romorantin- Nassira el Moaddem

Les filles de Romorantin

El Moaddem, Nassira
L'Iconoclaste

« L’une est restée l’autre est partie »

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 « L’une est restée l’autre est partie »

Les Filles de Romorantin est le premier livre de la journaliste Nassira El Moaddem, qui a vécu son enfance non pas en banlieue mais dans une sous-préfecture à la campagne, dans le Loir-et-Cher. Ses parents, Marocains, sont arrivés à Romorantin, dans les années 1970 elle y est née en 1984 et en est  partie après son bac, pour faire des études.

Nassira El Moaddem y est retournée pendant plusieurs mois, elle a renoué avec ses amis d’enfance restés dans la petite ville (18 000 habitants). À travers ces retrouvailles, elle nous éclaire sur l’actualité sociale : le mouvement des Gilets Jaunes, à travers l’histoire de Caroline, sa meilleure amie de l’école primaire ; les portes des banques qui restent fermées lorsque Otmane, un quasi-frère, décide de monter son garage avec un nom dont la consonance ne plaît pas ; les arrangements du maire, en poste depuis sa naissance, avec les puissants locaux ou nationaux ; et surtout les difficultés d’avoir un salaire qui couvre l’ensemble des factures lorsqu’on est une femme seule et qu’on élève des enfants. Elle fait le constat qu’un sentiment de déclassement s’est accru, que la France se sent abandonnée de Paris, que les médias ne l’ont jamais relayé et surtout que les usines sont définitivement fermés.

À travers de nombreux portraits d'habitants des milieux les plus défavorisés, ce livre est un « zoom » sur la crise sociale que traverse notre pays, et permet de la comprendre à l'abri des clichés grotesques (voire racistes) et des raccourcis véhiculés par certains médias. C’est autant le portrait d’un territoire blessé par la fermeture d’une usine (Matra, celle qui fabriquait les Renault Espace) qu’une réflexion sur le métier de journaliste et sur le rôle des chaînes d’info en continu sur l’exaspération et la méfiance des ouvriers, sur les scores des partis d’extrême-droite dans ces petites bourgades et sur les privilèges de la classe moyenne.

Ce récit touchant,  écrit à la première personne, mêlant enquêtes de terrain et réflexions personnelles, est très agréable à lire, même si ce qu’il raconte ne l’est pas forcément. Il est malgré tout optimiste, c’est le sentiment que j’ai eu en refermant le livre.

 

 

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