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Gagner la guerre - Jean Philippe Jaworski

Gagner la guerre : Récit du vieux royaume

Jaworski, Philippe 1969 - ...
Gallimard (1911 - ...)

"Gagner une guerre, c’est bien joli, mais quand il faut partager le butin entre les vainqueurs [...] c'est la curée qui commence."

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Tandis que flambent les derniers navires de la flotte du Sublime Souverain de Ressine, anéantie par les galères de la République de Ciudalia, Leonide Ducatore, le premier magistrat de la République affine déjà ses plans. Car une fois passé le temps des batailles, vient le temps du partage du butin.

Pour sortir triomphant de cette lutte pour le pouvoir qui se dessine au sein des familles aristocratiques de la République, Leonide Ducatore va devoir jeter toutes ses forces dans la bataille, y comprit son atout le plus précieux : son Maître-espion Benvenuto Gesufal, un assassin sans scrupule ballotté de complot en manigance, qui se voit attribuer la lourde tâche d'apporter une conclusion à ce conflit.

À la fois personnage principal et narrateur de l'histoire, Don Benvenuto est incontestablement la plus grande réussite de l'œuvre. Personnage ambivalent, à l'intelligence retorse, ce truand de la pire espèce parvient, paradoxalement, par sa verve, son argot et sa gouaille à se rendre attachant. Ce personnage singulier, qui multiplie les apostrophes à son lecteur et déforme les faits à son avantage, ajoute une touche de malice à la narration.

Pour son premier roman, publié en 2009, Jean-Philippe Jaworski signe un véritable coup de maître. Avec Gagner la Guerre, il replace son intrigue au cœur du Vieux Royaume, un monde dont il avait déjà entrepris de dessiner les frontières avec le recueil de nouvelles Janua Vera, publié deux ans plus tôt. Si les (més)aventures de Benvenuto nous entraînent aux confins du Royaume, l'essentiel de l'histoire se déroule au sein de Ciudalia, Citée-État très inspirée par notre Florence de la Renaissance. Au fil des pages, et à force de description du lacis de venelles des quartiers populaires ou des tours des demeures aristocratiques quadrillant le ciel des quartier nobles, Ciudalia devient un personnage à part entière de l'œuvre. Une entité vivante et terrible qui pousse les hommes aux pires exactions dans le but de s'attirer ses faveurs.

Moi, je n'avais d'yeux que pour la ville.
Élégamment accolée à la côte mais corsetée en ses remparts dentelés, cambrée de toutes ses tours et de tous ses palais, Ciudalia trônait sur le bord du continent. Plus fière que jamais, elle faisait mentir par sa magnificence tous les bruits de désastre. Il suffisait de la contempler, la garce splendide, serrée dans ses jupes de pierre et ses corsages de marbre, pour saisir le fin mot de la terrible affaire où nous sombrions tous. C'était une croqueuse d'hommes.

Gagner la guerre est un roman dense qui nous immerge dans un univers cruel et machiavélique mais surtout fascinant, porté par l'écriture magistrale d'un auteur capable de tisser la toile d'une intrigue politique complexe et subtile, sans jamais égarer son lecteur.