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La relation homme-animal : vers la révolution des esprits
Au-delà de la simple compassion, devrons-nous profondément changer nos modes de vie ?

 


Les Paysans de Flagey revenant de la foire - Gustave Courbet

 

Avec 280 associations œuvrant en faveur de la protection animale, la défense des animaux en France est largement partagée. Images chocs et actions coup de poing sont régulièrement relayées dans les médias. Elles incitent chacun d’entre nous à s’interroger sur les relations que nous entretenons avec les animaux et les contradictions qui en découlent.

Comment ce sujet, aujourd’hui sensible, et qui était autrefois tour à tour philosophique et moral, affectif, voire économique, s’inscrit désormais dans un cadre idéologique et politique, suscitant de nombreux débats.

Humanité et animalité

En Occident, l'homme s'est attribué une place privilégiée au sommet de l'échelle des êtres. Les implications de ce positionnement sont fortes d’un point vu philosophique, éthique et pratique. L’homme qui se considère comme n’étant pas un animal comme les autres, est à la fois animal politique, social et métaphysique. La domestication des animaux représente la forme achevée de la domination de l’homme sur la nature. Pour les spécistes, sa supériorité est confirmée par l’acquisition du langage et d’une culture qui lui permettent d’échapper à la sélection naturelle.

Traditionnellement, l’animal joue un rôle indispensable pour l’homme. Jadis, il n’était pas réduit à sa seule dimension alimentaire ou affective. Il représentait également un vecteur d’énergie, un compagnon de travail, un compagnon de vie. Les grandes civilisations ont longtemps oscillé entre la vision de l’animal-homme et celle de l’animal-objet. La pensée occidentale actuelle penche quant à elle du côté du concept de l’animal-être sensible.

Dans le cas de l’animal-homme, on peut citer les nombreux procès d’animaux qui ont eu lieu durant le Moyen-Âge. Accusés des pires crimes, ils étaient jugés devant un tribunal, défendus par un avocat… La bipolarité homme-animal s’exprime également dans la croyance en des Dieux mi-homme mi- animal, allant jusqu’à attribuer une âme aux animaux. Certaines religions et superstitions croient à la réincarnation de l’homme en animal et inversement. Ces croyances ont disparu du monde occidental, et ont laissé la place aux animaux anthropomorphiques de contes et autres dessins-animés.

La conception de l’animal-objet est à attribuer à Descartes, qui considère le corps de l’animal comme une machine dénuée d’âme et de sensibilité, théorie menant à la conception moderne de l’animal marchandise. C’est au XIXe siècle que Claude Bernard soutien la thèse selon laquelle les animaux sont des êtres doués de sensibilité, différents de l’homme dans leurs capacités intellectuelles mais semblables dans leur aptitude à ressentir la douleur. Un grand pas a ainsi été franchi sur la reconnaissance d’une conscience animale.


Illustration représentant une truie et ses porcelets jugés pour le meurtre d'un enfant.

 Aujourd’hui, Les défenseurs des droits des animaux réclament un statut juridique lié à sa nature d’animal sensible, et des mesures de protection particulières. Une proposition de loi contre la maltraitance animale vient d’être votée à l’assemblée nationale, nul doute qu’elle sera complétée par de nouvelles mesures dans l’avenir.


 


Photographie d'un lion

Identification et opposition

Les relations qu’entretiennent les hommes avec les animaux sont culturelles et varient d’une époque à une autre, d’une région à l’autre. Une fois le stade de la sacralisation animale dépassé, on peut classer les animaux selon trois grandes catégories hiérarchisées par rapport aux fonctions que leur ont attribuées les hommes.

  • L’animal « alimentaire », autrefois élevé à la ferme, est celui de l’animal de l’élevage industriel à fort rendement, aboutissant à des conditions de vie dégradée et à une pression toujours plus forte.
  • L’animal « familier », dit animal de compagnie, a connu une importante multiplication tout au long du 20e siècle.  Chien, chat, rongeur sont inclus dans la famille avec un rôle bien défini. Ils bénéficient d’un statut culturel élevé, promus « animal familial », teintés d’un anthropomorphisme très largement relayé dans les publicités et productions pour les enfants.
  • Les animaux « sauvages », bénéficient d’un statut privilégié qui leur confère une certaine sacralité. Témoins d’une Terre originelle à préserver, avec la croyance illusoire qu’ils restent éloignés de toute intervention humaine, ils concentrent une image de plus en plus fantasmatique.

Désormais l’animal est enfermé dans une relation de très (trop ?) grande proximité avec l’homme. Fusionnel, il tend à être considéré comme un double. Cette forte personnalisation des animaux, cette forme de transfert pourrait-on dire, aboutit selon certains chercheurs aux courants actuels qui identifient dans l’animal un individu, tandis que nos ancêtres y voyaient une collectivité.

Un combat social

Notre époque est au cœur d’un renouveau des débats relatifs à l’éthique animale. Impossible d’échapper aux images horrifiques qui dénoncent avec raison les conditions indignes dans lesquels les animaux d’élevage ou de cirque survivent. Ebranlés dans nos modes de vie, dans notre humanité, la culpabilisation n’est pas loin, et la remise en question incontournable.

Notre morale individuelle s’accommode ou alors on se lance dans l’expression de convictions animalistes voire antispécistes. L’animaliste défend les droits des animaux et s’inscrit dans une démarche qualifiée de démocratique et progressiste. L’antispéciste, forcément animaliste, réfute l’idée d’un ordre social fondé sur une hiérarchie des espèces et donc, sur une différence de traitement entre l’humain et l’animal. Les plus radicaux s’en feront un mode vie : le véganisme.

Ces mouvements, souvent virulents et aux actions spectaculaires, s’inscrivent dans un contexte de crise écologique et économique. Ils apparaissent sporadiquement sur la scène politique, le parti animaliste ayant été fondé en 2016. Ses adhérents dénoncent, entre autres, un système productiviste et désignent l’éleveur barbare comme le coupable idéal. Un système dans lequel l’animal-esclave est élevé pour l’abattage par un éleveur-esclave lui-même des industriels. Ils condamnent toute domination humaine sur l’animal mettant à l’index la chasse, la pêche, le cirque, la corrida et toute forme de maltraitance animale. Parfois qualifiés d’actes terroristes, leurs prises de position et leurs actions divisent.

La récente notion de « bien-être animal » est devenu un slogan politique mais surtout marketing. Rendu complice d’une extermination de masse envers les animaux, le consommateur de produits carnés est encouragé à devenir au moins « fléxitarien », néologisme créé de toute pièce par l’industrie agro-alimentaire qui vise à inciter à diminuer la consommation de viande et à privilégier la qualité plutôt que la quantité. Un entre deux plus ou moins hypocrite qui garantit la bonne conscience et la fortune des uns et le courroux des autres. Est-ce le début du grand changement vers un monde qui abolirait l’animal comme produit de consommation ?


Photographie d'une manifestation menée par l'association L214.

 Les nouvelles générations sont indéniablement les meilleurs représentants de cette tendance à considérer l’animal comme l’égal de l’homme. La question est délicate tant elle chamboule des modes de vie ancestraux et des habitudes ancrées dans de fortes traditions familiales et locales. Pour les plus convaincus, ce nouvel ordre social incarnera la fin d’un processus mental, ce qui laisse à croire que le XXIe siècle sera celui de la cause des animaux et de la fin de leur souffrance.

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