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Écrivain à 3 Temps
Cécile Coulon - Gaëlle Nohant

Samedi 16 novembre 2019
à 15h

Gaëlle Nohant et Cécile Coulon, à l'issue de la rencontre

© Cécile Coulon et Gaëlle Nohant

Samedi 16 novembre, Gaëlle Nohant était l’invitée de Cécile Coulon pour la seconde rencontre d’Ecrivain à 3 temps. Gaëlle Nohant est l’auteur de 3 romans ayant connu un grand succès auprès du public.

La rencontre de deux vocations précoces

Cécile Coulon a rencontré Gaëlle Nohant à l’occasion d’un salon littéraire. Le terme de « rencontre » prend ici tout son sens puisque elle a ainsi découvert un univers littéraire méconnu pour lequel elle nourrissait quelques a priori.

En effet, Gaëlle Nohant s’inscrit dans un courant d’écriture historique et romanesque, une inspiration différente de la sienne. La jeune autrice parle d’ailleurs avec ferveur de l’œuvre de Nohant, et décrit comment le roman La part des flammes  l’a « emportée », lui révélant le fait divers tragique de l’incendie du Grand Bazar à la fin du XIXe siècle.

Gaëlle Nohant quant à elle, parle de sa vocation farouche à devenir écrivain dès l’âge de 8 ans. Elle décrit un besoin vital, une vocation têtue, puisqu’il lui a fallu attendre l’âge de 30 ans pour être publiée. Elle souligne aussi son espoir de capter le lecteur, d’écrire le livre qu’elle aurait aimé lire. Mue par une « volonté narcissique » d’avoir une place chez des inconnus qui seraient liés entre eux par ses histoires à elle, Gaëlle Nohant écrit pour être lue et espère créer un imaginaire commun pour ses lecteurs.

Un souffle romanesque et militant

La part des flammes, s’apparente à la structure narrative des romans feuilletons du XIXe siècle. L’auteur tient en haleine son lecteur dans un enchaînement de situations dramatiques et épiques, car l’écriture de Gaëlle Nohant tranche avec la forte tendance à l’autofiction de la littérature contemporaine. Elle a à cœur de restituer les histoires individuelles qui traversent la grande Histoire, de mettre en lumière et d’incarner les petites voix de tous ceux qui subissent leur condition.

Gaëlle Nohant est ainsi une subtile féministe. En relatant le destin de trois aristocrates réunies par la tragédie du Grand Bazar, elle tente de redonner aux femmes l’attention qu’elles méritent, une plus juste place entre celle de la séductrice et de l’ingénue. Elle écrit pour exprimer son engagement contre la domination sociale et la domination masculine en particulier, en défendant sa vision du monde, contre les clivages.

Des femmes remarquables

Cécile Coulon rejoint son invitée sur le manque de personnages féminins auxquels s’identifier dans la littérature, et souligne l’importance d’apporter son point de vue en tant qu’auteur féminin et contre les clichés. Les deux autrices regrettent le manque de considération envers les femmes écrivains. Souvent moins estimées, elles sont encore souvent traitées avec condescendance par leurs pairs masculins.

La volonté de mettre en avant des destins de femmes exceptionnelles est l’un des traits d’union des deux femmes de lettres. Par le prisme de leurs personnages principaux : Blanche (Une bête au paradis) et la Duchesse d’Alençon (La part des flammes), les deux romancières dressent le portrait de femmes courageuses et quasi mystiques. Chacune d’elle, mise à l’épreuve, est en quête d’absolu. Elles s’engagent à leur manière dans un dépassement de soi, jusqu’à commettre un acte définitif, comme une invitation divine plus forte que tout qui symbolise de manière ultime un esprit émancipé et libre.

 


« Desnos a changé ma vie »

Une liberté chère à Robert Desnos dont Gaëlle Nohant relate la vie riche et le destin tragique dans son 3eme roman : Légende d’un dormeur éveillé. Le poète a vécu une sorte de compagnonnage avec les artistes surréalistes du quartier Montparnasse, dans le Paris des années 30, jusqu’à son internement et sa mort dans un camp de concentration. « Son Desnos » n’est pas juste un rêveur, c’est « un rêveur éveillé » qui a transcendé sa vie et laissé une trace lumineuse pour les autres. La poésie a constitué pour lui un engagement absolu et vital. Gaëlle Nohant a cherché à ressusciter la vérité de ce personnage d’écrivain par la fiction. En accomplissant une sorte de recherche spirituelle pour se rapprocher de lui, elle réussit le portrait habité et vibrant d’un homme qui « tel un cheval, galope au-delà des montagnes ». Robert Desnos connaissait la fragilité du bonheur et bien qu’étant férocement athée, il n’en demeurait pas moins un être spirituel et mystique, éperdu d’amour et d’amitié. « Il a transcendé sa vie en faisant du bonheur une énergie qui se crée tous les jours ».

Cette poésie du quotidien fait écho au recueil publié par Cécile Coulon : Les Ronces. Cet ouvrage ayant reçu le prix Apollinaire 2018, rassemble les poèmes que l’auteure a publié durant plusieurs mois sur Facebook, une poésie personnelle sensible et nostalgique.

C’est un poème riche en images, pauvre en divertissements.
Rassure-toi. Il ne dure pas longtemps.
Il ne reste pas. Il est plus léger qu’un sanglot,
Plus fin qu’une tige de coquelicot.
Il ne demande rien parce qu’il n’a pas de langue
Ni de gorge. Il ne possède pas
Ce que nous avons la chance d’apprendre
Dans les sous-sols de ce château en ruines
Que nous appelons « enfance ».

Ton poème dans Les ronces, éditions Le Castor Astral.

À la veille de la publication de son nouveau roman : La femme révélée, Gaëlle Nohant conçoit ses romans comme une invitation. Elle revendique une littérature qui donne toute sa place à la simplicité sans en appauvrir la portée. Ainsi, Cécile Coulon et Gaëlle Nohant se définissent toutes deux et avec bonheur comme des autrices populaires.

Rencontres littéraires
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