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Le monarque des ombres - Javier Cercas

Le monarque des ombres

Cercas, Javier 1962 - ...
Actes Sud

Avec ce roman de la rentrée littéraire, Javier Cercas poursuit son projet autour de l'enquête historique

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Avec Le monarque des ombres, Javier Cercas creuse la voie littéraire empruntée il y a près de quinze ans, à savoir le roman-enquête autour d'épisodes politiques restés tabous de l'histoire de l'Espagne du XXème siècle.

Les soldats de Salamine, récit qui l'a fait connaître, se déroulait à la fin de la guerre civile espagnole ; avec ce dernier livre, Javier Cercas reprend le fil de ce traumatisme à travers la figure de son grand oncle, Manuel Mena, officier phalangiste mort au combat à 19 ans, autour duquel un secret familial ou tout au moins un épais silence, se sont sédimentés.

La tonalité tout à fait originale de ce livre, voix que l'on peut comparer à celle d'un Emmanuel Carrère dans ses écrits à la marge du journalisme et de l'autobiographie, réside dans une libre association de l'enquête, avec son recueil d'archives, de lieux, de parole des survivants, et du discours introspectif de l'auteur, flux ininterrompu évoquant sans détours la difficulté de révéler la participation de sa famille à un épisode peu glorieux de l'Espagne, l'installation du régime de Franco.

Via un passionnant périple temporel et géographique, Javier Cercas nous fait partager les étapes traversées, de l'acceptation de cette réalité jusqu'à l'élaboration finale d'un récit qui non seulement dévoile, mais,- c'est sa force -, reconstruit cette histoire enfouie tout en en révélant les ambiguïtés.

Le roman conduit le lecteur à s'interroger sur les figures atemporelles du tragique et de l'héroïsme, convoquant le mythe antique d'Achille, le "monarque des ombres". Javier Cercas rassemble toutes les ressources du romancier, créateur de fables, et de l'historien, chercheur de l'improbable véracité des faits, afin d'exhumer une vie sacrifiée à une cause injustifiable, avec la conscience que l'essentiel toujours échappe, à savoir la capacité de donner vie à ce Manuel Mena, de toucher du doigt ce que pouvait être la perception de la guerre par un tout jeune homme de 1938 dépourvu du recul historique d'un citoyen du XXIème siècle.

Je raconterais l'histoire de Manuel Mena pour que son histoire malheureuse de triple perdant de la guerre ne se perde pas complètement... pour raconter qu'elle renfermait de la honte mais aussi de la fierté, du déshonneur mais aussi de la rectitude, de la misère, mais aussi du courage, de la saleté mais aussi de la noblesse, de l'horreur mais aussi de la joie, et parce que dans cette histoire se trouvait ce qui se trouvait dans ma famille et peut-être dans toutes les familles – échecs et passion et larmes et faute et sacrifice.

"Peut-on être un jeune homme noble et pur et en même temps lutter pour une mauvaise cause ?" est la question fondamentale posée par ce texte beau et émouvant, porté par la démarche courageuse d'un écrivain qui, cherchant la lumière, trouve le clair-obscur.

nathalie

Livre
Roman